SNK, une petite société de jeux vidéos d'arcade, est crée en 1978 par Eikichi Kawasaki, sous le nom de Shin (nouveau) Nihon (Japon) Kikaku (projet) dans la banlieue d'Ôsaka. Les premiers jeux sont assez modestes mais certains sortent du lot comme Vanguard en 1981 (qui a été réalisé en fait par la société Tose) puis Ikari Warriors en 1986, le jeu qui va définitivement faire connaître la firme. Le succès aidant, la société change de nom (SNK Corporation) en avril 1986 et se fait construire un building dans le centre d'Ôsaka (Suita City), où la firme emménage définitivement en mars 1988.
SNK, avec l'aide de ADK, et d'après un concept imaginé dès 1987, lance en janvier 1990 un nouveau format arcade, le NeoGeo MVS (pour Multi Video System). Compatible Jamma, il permet également d'avoir une carte-mère distincte des jeux, ceux-ci sont interchangeables très facilement via un port cartouche.
Décliné dans une version de location dans les hôtels, SNK sort une version pour les particuliers, en avril 1990, avec un format de cartouche légèrement différent pour la différencier du marché de l'arcade, la NeoGeo de salon dite AES pour Advanced Entertainement System.
Ainsi il n'existe aucune différence entre les jeux des bornes MVS et ceux des consoles NeoGeo. Mais comme il a été choisi un support cartouche, le coût de production reste très important, du fait du prix de la mémoire présent dans les jeux.
Si l'on s'en tient aux déclarations des deux dirigeants de la firme, M. Takashita et M. Yamagushi, SNK semble vouloir développer un nouveau modèle de consommation de jeu vidéo, une sorte de marché de l'arcade pour la maison, secondé par la location et des games center dédié, le premier NeoGeo Land ouvre d'ailleurs en Novembre 1992 à Esaka. Même si le principe semble prendre, les ventes ne décollent pas et ne semble se résumer qu'à quelques dizaine de milliers d'unités vendus...
SNK, comme tous les constructeurs japonais de l'époque, ne s'intéresse que peu au marché européen, jugé trop compliqué (normes et langues différentes etc.). D'abord importé par des boutiques spécialisées (comme Shoot Again), c'est finalement Guillemot International qui devient l'importateur officiel de la NeoGeo en France fin 90. Elle est d’ailleurs présentée officiellement pour la première fois lors du Salon de la micro, 26 au 29 Novembre 1990, au salon de la Villette à Paris.
En 1991 et 1992, SNK essaye d'implanter sa console, surtout sur le marché US et accessoirement européen où plusieurs partenariats sont crées et associés à une filiale européenne de SNK.
Malgré un très grand succès d'estime, la console ne perce toujours pas. Le prix des jeux, reste le frein majeur aux ventes: un effort est cependant fait en 1991, puis le succès aidant de Fatal Fury 2 va permettre a la console de se vendre un peu mieux.
Parallèlement, l'intérêt de l'ensemble de l'industrie pour le CD-ROM commence à se faire sentir lentement, après la réalisation du CD-ROM de Nec pour la PC-Engine en 1988, Sega sort le Mega-CD fin 91. Le mouvement s’accélère clairement avec le standard 3DO en 1993. Sega et Sony annoncent également travailler pour ce nouveau support pour leurs prochaines consoles.
Chez SNK on laisse entendre qu’un CD room est à l’étude pour la NeoGeo (ou une version CD) vers les années 1992, puis en 1993 la firme annonce développer une nouvelle console avec un support CD, la Neo Star… Début 1994 le Projet NeoStar est officiellement abandonné pour des raisons de coûts. Le chiffre de 700 dollars de prix de vente qui a été annoncé est à mettre en parallèle du prix de la 3DO en avril 1993, assez proche du concept de SNK. On peut se demander si SNK n'a pas conclue, après les annonces de Sega et de Sony fin 1993, que son hardware ne soutenait pas la concurrence des nouvelles consoles en préparation :
La Neo Star aurait disposé d'un RISC à 14.5 MHz
La 3DO a un RISC à 12,5 MHz
La Playstation a un RISC à 33, 8 MHz
La Saturn a 2 RISC à 28.6 MHz x
Certes, la puissance du processeur ne fait pas tout, mais sachant que les équipes de SNK n'auraient pas le temps de maîtriser ce nouveau support avant un certains temps, et vus le coûts de la console, c’est à se demander si SNK n’a pas changer son fusil d’épaule à la dernière minute, et n’a pas réalisé dans l’urgence, une modification de son projet initiale en le scindant en deux :
- Une simple adaptation d’un lecteur CD à la NeoGeo pour palier surtout aux coûts des cartouches et rendre ce modèle plus grand public.
- Prendre plus de temps pour réaliser une nouvelle carte arcade, quitte à la décliner en console de salon, ce qui deviendra l’Hyper NeoGeo 64 avec un processeur RISC cadencé à 50 MHz mais qui ne sort qu’en 1997 et se trouve surclassé par le Model 3 de Sega...
C'est finalement le 2 Juin 1994 qu'est annoncé en avant premiere la NeoGeo CD en marge du Tôkyô Game Show, au Prince Hotel. Le prix des jeux est donc divisé par 5 ou 6. Une version "de luxe" avec lecteur de CD frontal est proposé pour le marché japonais le 9 septembre 1994 au prix de 49800¥ (un peu plus de 200€ ), puis courant octobre 1994, une version plus économique à produire (avec un lecteur CD accessible par un capot et non à tiroir) est vendu pour le meme prix. La NeoGeo CD était annoncée, notamment dans la presse française, comme reprenant la suite de la version cartouche.
photo général du Jamma show 94, de la conference de presse de SNK, du stand NeoGeo CD, et de la photo de promotion de la NeoGeo front loading
Aprés cette annonce SNK lance un "NeoGeo CD Live Tour", une sorte de grands show de présentation de la nouvelle console, avec présence des personnalités de la firme, séances de test public, tournois, ... dans 6 grandes villes Japonaises, commencé à Hokkaido, ils passent par Osaka, Nagoya avec un grand finale sur Tokyo. Il sera reconduit en 1995 puis changera de nom en 1996 en SNK Tour.
Au CES de Las Vegas 95, avec les 16 ecrans qui faisait tourner les jeux CD comme Kof 94 et Samurai Spirit II, dont on voit 2 hotesses en cham-cham (qui ont d'ailleur été nominée au best babe du salon)
Les ventes semblent au rendez-vous, les 30 000 exemplaires de la version front loading notamment ont été totalement écoulé en quelsques jours: 25 000 pour le japons et 5 000 à l'exportation.
La NeoGeo CD est présente sur un grand nombre de salons :
_ Tôkyô Toy Show (Omocha show / AOU Show ) pour son annonce en juin 1994
_ Jamma Show 1994 (ou AM Show), en août 1994
_ Super Games Show à Paris du 30 novembre au 4 Decembre 1994, présenté par Guillemot, l'importateur français
_ CES de Las Vegas, du 6 au 9 Janvier 1995
_ E3 à Los Angeles, du 11 au 13 mai 1995
_ Tôkyô Toy Show (Omocha show / AOU Show ) en juin 1995
plan de l'E3 95 avec l'emplacement du stand SNK avec des photos de la partie dédié à la NeoGeo CD
Et en France même où il fallait attendre son tour pour pouvoir y jouer lors de sa présentation au salon Super Games Show (comme quoi les joueurs de NeoGeo CD n'arretent pas d'attendre..)
Ainsi qu'à travers des campagnes de publicité dans la presse spécialisé (organisé en France par Guillemot International, son importateur officiel).
Le tableau des ventes de SNK réalisé par Yori selon les chiffres de Famitsu, avec toute la relativité d'usage, sont cependant particulièrement significatifs. Si ceux-ci sont honorables en 94 et 95, on assiste à une lente décroissance à partir de 1996.
Quand on voit que 103 000 Samurai Spirits 2 ont été vendus en décembre 94. Sachant que c'est le tire qui à été le plus demandé dans la première line up on peut donc en conclure qu’on est à un plus de 100 000 consoles vendues. Rapporté au 300 000 PlayStation vendues en décembre 94, la NeoGeo CD réalise un bon lancement. La concurrence est féroce mais très vite on voit que les choix de SNK ne prennent pas.
Fin 1995, la NeoGeo atteint son meilleur chiffre de vente de jeu avec 158000 exemplaires de KOF' 95. À partir de là, les ventes ne font que décroître mais on est déjà bien loin des 2 millions d’unités vendues pour la PlayStation.
D’abord parce que le marché des jeux vidéos a changé, les jeux en 3D sont désormais particulièrement prisés. La NeoGeo comme la NeoGeo CD sont incapables de répondre à cette attentent de pars leurs configurations hardware. Elles ne peuvent proposer que de la 3D isométrique tout au plus. Celle-ci est particulièrement difficile à programmer et la qualité est variable. Alors que Viewpoint s’en sortait avec les honneurs, le rendu est médiocre pour Ragnagard.
Le soutient des éditeurs-tiers ensuite fait toujours défaut à SNK dans son aventure console, ce qui limite considérablement le catalogue de la NeoGeo CD. Aucun éditeurs européens par exemple ne croient en l’avenir de cette console (CD Concept N°2). À sa sortie, aucun titre original, les premières exclusivités CD sortent fin 1995 et le peu de succès aidant, la majorité des productions sont stoppées (voir la rubrique Proto). Il faudra attendre juin 1997 pour voir le seul titre d’envergure, Samurai Spirits RPG, soit presque trois ans après la sortie de la console. Conscient de ce problème, SNK semble se rapprocher des autres éditeurs. Au Jamma Show de septembre 1995, Sega et SNK ont tenu une conférence commune annonçant l’échange de titres, avec la convertion de titres Saturn sur NeoGeo (Maximun N°2), mais rien ne vit le jour dans ce sens. À l’inverse, SNK convertira ses exclusivités sur les consoles concurrentes avec plus ou moins de bonheur, ce qui aura plutôt tendance à desservir son image car la majorité des conversions PlayStation sont ratées, et de saborder encore plus ses consoles en lui enlevant son exclusivité.
Les temps de chargements enfin, relativement succincts au début de la NeoGeo CD, s'allongent sur les grosses productions et mécontentent beaucoup d'amateurs d'arcade et ce dés le lancement de la console.
Petit aparté sur le manque de soutient des éditeurs pour SNK. Aucuns éditeurs européens par exemple ne croient en l’avenir de cette console. Ainsi dans le CD Concept de Fevrier 1995 p.15, des représentants des plus grosses sociétés européennes sont interrogés sur les nouvelles consoles, voici leurs avis sur la NeoGeo CD:
Codemaster, sébastien soulier : petit marché
Cryo, emmanuel Forsans : trop chère
Electronics Arts, Karine Dognin: j'y crois pas
Ocean, Georges et Alain : superbe machine (faux cul...)
Mindscape, Emmanuel Denis : pas génial en Europe
Silmarils, Louis Marie Rocques: on en parle dans un an
US Gold, Pascal Fassot: Bof
Conscient des défauts de sa console, SNK développe une version plus compacte mais surtout plus rapide qui sort en décembre 1995, la NeoGeo CDZ. Celle-ci n'est commercialisée que sur le Japon. Pire, la localisation américaine de la NeoGeo CD se fait à quelques mois de la CDZ et SNK Japon préfère envoyer ses fonds de stocks de la NeoGeo CD top loading. Du coup, la console ne perce pas au USA, il est de même en France où Guillemot lâche l'importation de la console courant 1995.
Il est clair que SNK paye le prix de son faible investissement dans la recherche et le développement. On voit bien que la NeoGeo CD a été sortie dans l'urgence pour devancer la concurrence de Sony et de Sega. Elle s'inspire au passage sans vergogne des réalisations d'autre constructeurs: la forme de la front loading ressemble beaucoup à une Panasonic 3DO FZ-1, le fonctionnement du tiroir avec notamment l'ouverture/fermeture via le Menu peut s'inspirer du MegaCD de Sega (et ça c'était pas spécialement une bonne idée) etc.
La CDZ est déjà mieux conçue au niveau du hardware mais sort un an trop tard. C'est d'autant plus désolant que la NeoGeo CDZ semble avoir trouvé son publique dès sa sortie au japon. On constate même une pénurie sur les 4 premiers mois de commercialisations où l'offre ne pouvait satisfaire la demande...
SNK a perdu là une occasion de s'installer sur le marché notament international et se replie sur une niche d’amateur d’arcade essentiellement japonaise. Aucun chiffre de vente ou de production n’a été diffusé officiellement , pourtant le fait que 7 séries différentes de carte-mère ont été produites de 1994 à 1995 montre cependant que la console continue à se vendre au moins jusqu’en fin 1995.
Il existe en effet :
- 1 carte-mère pour la NeoGeo CD front loading du 13/06/94
- 5 cartes-mères pour la NeoGeo CD top loading de août 1994 à mars 1995 soit les 22/08/94, 08/09/94, 14/11/94, 30/01/95, 06/03/95
- 1 carte-mère pour la NeoGeo CDZ, produite le 13/10/95
Par contre Consoles + un magazine français sort dans son N°73 de février 1998, une page des chiffres de ventes de quelques consoles, de la date de leurs sorties à Mars 1997:
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Vente de Mars 1996 à Mars 1997 |
Chiffre de vente Mondiale |
Japon |
Hors Japon |
NeoGeo AES |
60 000 |
410 000 |
350 000 |
60 000 |
NeoGeo CD |
70 000 |
570 000 |
450 000 |
120 000 |
Si les chiffres demandent à être confirmé, on voit que la NeoGeo CD ne perce pas. Mais au final elle s'est tout de même beaucoup mieux vendu que bon nombre de console de sa génération comme le Mega CD de Sega, le PC FX de nec, l'Amiga CD32 de Commodore, la jaguar d'Atari etc. La Gamme NeoGeo CD est cependant essentiellement localisée au Japon qui concentre les 3/4 des consoles vendus.
Echec commerciale relatif, la console n'est cependant jamais abandonnée par SNK jusqu'à son rachat par Aruze en janvier 2000. La pluparts des jeux sortiront sur le support CD, soit 97 titres au total.
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