Autour de Treasure of the Caribbean
Interview avec Le Cortex
-Pouvez-vous vous présenter ?
Nous sommes deux co-fondateurs de la société, Fréderic Sommer et Johan Spielmann. Actuellement, notre structure compte cinq permanents, mais nous faisons régulièrement appel à des free-lances en fonction de la charge de travail. Nous nous sommes rencontrés car nous sommes avant tout des joueurs. Comme on était tous les deux du même milieu et comme on s’entendait bien, on a gardé le contact. Nous avons fondé en 2006, avec d'autres, une société qui s’appelait « Studio Le Caillou ». Finalement en 2008, nous avons préféré prendre notre indépendance et fondé LE CORTEX pour faire des jeux comme on l'entendait.
- Quels sont les jeux auxquels tu as collaboré et celui ou ceux dont tu es le plus fier (ou pas) ?
Pour te répondre, il faut prendre en compte tous les aspects de la conception d'un jeu. Notamment le temps impartis. Par exemple pour « Bienvenue chez les Ch'tis », on nous a demandé de faire le jeu en un mois sur Nintendo DS !! Donc, par rapport aux contraintes, on trouve qu'on s'en est pas mal sorti.
Sinon, notre jeu qui s'est le mieux vendu est « We Sing », une licence qui fonctionne très bien un peu partout dans le monde mais qui n’est malheureusement pas distribuée officiellement en France. Au total, nous avons onze localisations et presque un million et demi de ventes. Pour cette série, on s’est demandé quelles seraient les attentent des joueurs, sur Wii, achetant un jeu musical pour y répondre au mieux. Apparemment, cela a bien fonctionné.
- Une société française, NCI, a acheté les droits de plusieurs prototypes Neo Geo et vous a chargé de travailler sur certains d'entre eux. Comment est-ce que cela s’est passé et pourquoi a-t-elle eu besoin de vos services ?
La rencontre c'est fait un peu par hasard via des forum. NCI cherchait à avoir des infos sur le hardware de la Neo Geo. Comme ils ne sont pas développeur, ils recherchaient une équipe et de fil en aiguille ils nous ont proposé de développer le jeu « Treasure of the Caribbean ».
- Connaissais-tu la Neo Geo avant ce projet ?
Oui, bien sûr, comme tous les joueurs de notre génération. D’ailleurs, quand d’autres studio nous demandent sur quel jeu on bosse en ce moment, on est très fier de dire qu'on développe sur Neo Geo... C'est une sorte de gageure : « THE FUTURE IS NOW » !
- Au départ, qu’avez-vous pu récupérer du prototype de Treasure of the Caribean ?
Il faut savoir qu'on avait peu de données du jeu original. Nous disposions de quelques images et surtout d’aucun code source.
- Quels ont été les moyens engagés pour réaliser le jeu (délais, budget, équipe, logiciels, etc.) ? Et quelles ont été les contraintes les plus importantes pour le développement ?
Nous avions un mois. D’ailleurs, le jeu a été réalisé dans les délais. Cependant, nous avons rencontré un problème de taille : le son. Au départ nous nous sommes appuyés sur les librairies disponibles sur internet. Mais nous avons rapidement constaté que celles-ci ne fonctionnaient pas sur le Hardware d’origine. Il a fallu tout reprendre à zéro et nous avons programmé notre propre driver maison.
Ce qui fait que, si l'on ramène ça au temps de travail passé, nous avons clairement perdu de l'argent sur ce projet.
Cependant, le bon côté des choses est que nous disposons maintenant d’un kit de développement complet sur NEO GEO. Nous comptons faire plusieurs projets sur ce support et il y a de fortes chances pour que, lorsque nous aurons fini de faire ce que nous voulons sur Neo Geo, nous mettions tout ce que nous avons fait en ligne pour que la communauté puissent continuer à faire vivre le support.
La difference de son entre la version CD et AES sont importantes, pourquoi ?
L'AES que nous utilisions avait une taille réduite (Nota: NCI avait deja acheté des cartouches AES de super sidecick 2) et j'ai dû compresser le son en 18500khz puis réduire la taille des pistes de 5mn à 1mn. Comme les morceaux « souffrent » dans ce format et pour éviter d'obtenir une purée, j'ai réduit le nombre d'instruments et donné une sonorité légèrement plus "old school" aux pistes.
Par contre, les pistes CD sont en 44khz et durent en moyenne 5 mn (merci aux 650mo du cd ;) ).
Les arrangements sont plus complexes et intègrent un grand nombre d'instruments de manière à refléter plus fidèlement l'univers de la piraterie.
Version AES |
Version CD |
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- Quel a été votre environnement de développement (codé directement en C, graphismes bitmaps, musiques, etc.)
On a travaillé comme pour un jeu normal mais en gardant à l'esprit les contraintes de la console (graphismes en 16 couleurs notamment). Le code a été réalisé en C avec des parties directement en assembleur. Pour les graphismes, nous avons majoritairement utilisé Photoshop et Promotion. Ainsi que Wavosaur et Audacity pour le son.
- Vous êtes plutôt habitués à travailler sur des machines « contemporaines ». Pourquoi vous intéresser au rétro-gaming ?
Le coté challenge, bien sûr ! Réaliser des jeux dans un environnement extrêmement contraignant nous oblige à donner le meilleur de nous-même. De plus, en tant que développeurs, le retro gaming c’est notre « madeleine de Proust ».
- Quels sont vos futurs projets ?
Nous avons créé un univers autour d’un personnage qui s’appelle Ninja Poney.
Nous avons déjà prototypé un jeu de plates-formes qui met en scène Ninja Poney et sa compagne BikiNinja pour consoles next-gen.
Nous sommes actuellement à la recherche d’un éditeur pour ce projet. Pour Ninja Poney, on trouvait intéressant de créer un personnage qui trouvera son origine dans l’histoire du jeu vidéo. Quel meilleur support que la console reine du retro gaming : la NEO GEO ?
C’est pourquoi, nous sommes en train de développer un shoot pédestre à la Ninja Commando, qui va s'appeler « Crouching Poney, Hidden Dragon ». Le titre est un clin d’œil au film de Ang Lee.
Dans ce jeu, Ninja Poney se déplace de niveau en niveau dans un scrolling multidirectionnel en vue top. Les maps sont complexes et non-linéaires, sachant qu'on a aura la possibilité (on sera même obligé) de parcourir plusieurs fois la carte, en tous sens, pour compléter les objectifs. Le principe est aussi plus tactique : les ennemis, d'une douzaine de types, sont de deux couleurs comme les tirs du personnage. Il faudra donc utiliser la bonne couleur de tir en fonction de la couleur de l’ennemi, sous peine de voir son propre tir revenir.
Un grand merci à eux pour leurs disponibilités et gentillesses.